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Le secteur hypothécaire attache sa ceinture en vue de l’entrée en vigueur, demain, des nouvelles règles de CANAFE contre le blanchiment d’argent

Les nouveaux règlements de CANAFE vont affecter les professionnels hypothécaires de tout le pays.

FINTRAC AML

CANAFE resserre dès demain son étau anti-blanchiment sur les courtiers et prêteurs hypothécaires canadiens. Ces professionnels devront se plier à de nouvelles exigences de conformité aux mesures de lutte contre le blanchiment d’argent (BA).

Le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) est l’organisme fédéral responsable de la surveillance et de l’analyse des opérations financières pour lutter contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et l’élimination des sanctions.

Chien de garde financier du Canada, CANAFE surveille déjà les banques, les coopératives de crédit et les assureurs-vie. L’organisme élargit maintenant son champ d’action à l’industrie hypothécaire. Son objectif ? « Renforcer le système financier canadien ». CANAFE veut s’assurer que les agences hypothécaires mettent en place des contrôles pour prévenir et signaler les activités suspectes.

Un représentant de CANAFE a déclaré à CMT : « Le Canada a réévalué les risques de blanchiment d’argent et de financement des activités terroristes. Cette analyse pointe du doigt les prêteurs hypothécaires non réglementés comme très vulnérables. Elle identifie aussi la fraude hypothécaire comme un risque majeur de blanchiment. »

Comment le secteur hypothécaire réagit-il ?

La surveillance de CANAFE divise le secteur hypothécaire. D’un côté, on salue une arme efficace contre le blanchiment et le financement terroriste. De l’autre, on redoute un carcan réglementaire pour les entreprises.

Lauren van den Berg, présidente de Professionnels hypothécaires du Canada, voit dans ces exigences « une étape vers un secteur plus fort et transparent ». Elle appelle cependant CANAFE à la vigilance : « Les règles doivent être efficaces contre le blanchiment et la fraude, sans noyer les courtiers sous la paperasse. »

« S’adapter à ces nouvelles règles sera délicat, admet Mme van den Berg à CMT. Mais l’enjeu est de trouver le juste équilibre. Dans ses changes avec CANAFE, PHC a fermement contesté les exigences de conformité que ses membres jugeaient comme des fardeaux administratifs superflus. L’objectif reste de protéger les consommateurs, préserver l’intégrité de notre industrie et sauvegarder l’économie. Cependant, nous insistons pour que la conformité demeure équitable et gérable pour tous les acteurs concernés. »

Joe Jacobs, de Mortgage Connection et ex-président de PHC, s’inquiète. Il redoute l’impact du coût de la conformité sur les opérations des agences hypothécaires : « Ces nouvelles exigences bouleverseront le quotidien des courtiers et des maisons de courtage, explique-t-il. Vérification d’identité, dépistage, analyse des risques, déclarations d’opérations douteuses, rapports renforcés… Tout cela implique de nouveaux processus, de la formation, des outils technologiques et des coûts supplémentaires. C’est un véritable défi opérationnel. »

Dave Teixeira, vice-président des opérations chez Dominion Lending Centres Group, tempère les inquiétudes : « Ces exigences ? Rien de nouveau ! Certains agents se sentent visés injustement. Ils oublient que d’autres secteurs vivent avec ces règles depuis longtemps. Les courtiers immobiliers et les banques, par exemple. Ce n’est pas nouveau, c’est juste que ça nous tombe dessus maintenant. »

M. Teixeira insiste sur la collaboration avec CANAFE pour maîtriser la réglementation : « Chez DLCG, nous soutenons la lutte anti-blanchiment. Nous embrassons la réglementation et dialoguons régulièrement avec CANAFE. C’est notre façon de garder le cap. »

M. Teixeira mise sur la technologie pour alléger le fardeau de la conformité : « Nous avons vite compris : sans technologie, la conformité écraserait nos agents. D’où notre partenariat avec Newton Connectivity Systems et l’adoption de leur système Velocity. »

Geoff Willis, PDG de Newton Connectivity Systems, tire la sonnette d’alarme. « Gare à la complaisance ! CANAFE a des crocs et ne plaisante pas avec la conformité. Les professionnels hypothécaires doivent s’équiper de plateformes performantes. »

« Gérer un bureau avec des préparateurs éparpillés sur diverses plateformes ? Un vrai casse-tête, avertit M. Willis. Sans cohérence dans vos opérations, impossible d’assurer une conformité standardisée et un suivi continu. C’est la porte ouverte aux problèmes. »

Selon M. Willis la plateforme Velocity de Newton enchâsse la conformité au cœur même des activités de son entreprise.

Des réponses à vos questions sur les nouvelles règles de CANAFE

Quand la nouvelle réglementation doit-elle entrer en vigueur ?

Dès demain, vendredi 11 octobre 2024, le secteur hypothécaire sera soumis à la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Cette même loi a instauré CANAFE comme organisme de surveillance canadien contre le blanchiment d’argent.

Qui doit s’y conformer ?

CANAFE englobe prêteurs, administrateurs et courtiers dans sa définition du secteur hypothécaire. L’organisme propose un outil d’auto-évaluation en ligne. Objectif : aider les professionnels à savoir s’ils sont concernés par les nouvelles exigences.

Vous pouvez accéder à l’outil d’auto-évaluation en cliquant ici.

Quelles sont les nouvelles exigences ?

Les entités hypothécaires réglementées doivent se plier à un nouveau cadre de conformité exigeant. Elles devront établir un programme dédié, vérifier rigoureusement l’identité des clients et tenir des registres minutieux. De plus, elles seront tenues de signaler à CANAFE certaines opérations financières jugées sensibles. Parmi celles-ci figurent les transferts internationaux électroniques, les opérations importantes en espèces ou en monnaie virtuelle, ainsi que toute activité suspecte pouvant être liée au blanchiment d’argent ou au financement du terrorisme.

Principales obligations pour les agences hypothécaires

Les maisons de courtage portent le poids des nouvelles exigences. Elles doivent orchestrer le programme de conformité, désigner un agent dédié et piloter tout le processus : de l’identification des clients au suivi des opérations, en passant par les rapports et l’archivage.

Quant aux courtiers individuels, ils ne sont pas en reste. Leur défi ? Appliquer ces politiques au quotidien et se former assidûment selon les exigences de leur maison de courtage.

Formation
Formez votre équipe aux nouvelles règles anti-blanchiment et anti-terrorisme. Apprenez-leur à repérer et signaler les activités louches. La clé ? Une formation continue pour rester dans le rang.

Programme de conformité
Mettez en place un programme de conformité robuste. Nommez un agent dédié et élaborez des politiques limpides : identification des clients, tenue des registres, déclaration des opérations. Restez vigilants : évaluez fréquemment les risques, surtout pour les clients et transactions sensibles.

Bien connaître son client (BCSC)
Avant toute relation d’affaires, authentifiez l’identité de vos clients. Exigez des pièces officielles ou des vérifications de crédit gouvernementales. Pour les profils à haut risque, comme les personnes politiquement vulnérables, redoublez de vigilance. Surveillez de près leurs activités.

Vigilance et déclaration
Surveillez attentivement les opérations de vos clients et déclarez toute activité suspecte ou toute opération en espèces dépassant 10 000 $. Les opérations en monnaie virtuelle au-delà de ce montant doivent également être déclarées.

Archivage
Conservez des archives détaillées sur l’identification des clients, les opérations et les rapports pendant au moins cinq ans. Cela est essentiel pour garantir que vous pouvez démontrer votre conformité en cas d’audit.

Signalement des opérations

Les professionnels hypothécaires doivent déclarer certaines activités à CANAFE « dès que possible », notamment les déclarations d’opérations douteuses (DOD) pour toute activité suspecte et les déclarations de biens appartenant à un groupe terroriste si les activités sont liées au terrorisme. Une déclaration d’opération importante en espèces est obligatoire pour toute transaction en espèces de 10 000 $ ou plus, sauf lorsque les fonds proviennent d’institutions financières ou d’organismes publics.

Comment soumettre les rapports

Les professionnels hypothécaires peuvent soumettre les déclarations requises via le Système de déclaration en ligne de CANAFE, un portail en ligne conçu pour permettre aux entreprises de produire des déclarations rapidement et efficacement. De plus, les déclarations peuvent être transmises par le biais de transferts de système à système à l’aide de l’API de CANAFE si l’entité hypothécaire utilise une plateforme compatible.

Identification des clients

Les professionnels hypothécaires doivent vérifier l’identité de tous les clients avant de s’engager dans une relation d’affaires. Ils doivent utiliser des méthodes approuvées, telles que les pièces d’identité d’origine gouvernementale ou les vérifications de crédit. Pour les personnes politiquement vulnérables (PPV) et les chefs d’organisations internationales, une vigilance renforcée est nécessaire, ce qui peut impliquer la collecte de détails supplémentaires, comme la source des fonds. Tous les dossiers, y compris les documents d’identité et les rapports connexes, doivent être conservés en toute sécurité pendant au moins cinq ans.

Sanctions

CANAFE impose des pénalités en fonction de la gravité de l’infraction. Les infractions mineures peuvent entraîner des amendes allant jusqu’à 1 000 $, tandis que les infractions plus graves peuvent entraîner des pénalités pouvant atteindre 100 000 $ pour les particuliers et 500 000 $ pour les entreprises. Dans les cas extrêmes, le non-respect pourrait entraîner des accusations criminelles, avec des amendes pouvant atteindre 2 millions de dollars et même des peines d’emprisonnement. CANAFE souligne que les pénalités sont conçues pour encourager la conformité, pas seulement pour punir. Une non-conformité répétée ou grave peut également entraîner une atteinte à la réputation et une perte potentielle de licence.


Vous pouvez consulter la version intégraledes directives de CANAFE en cliquant ici.

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Last modified: octobre 10, 2024

Écrivain, journaliste, Duffie Osental s’intéresse aux marchés des prêts hypothécaires, des assurances, de la gestion du patrimoine et des finances personnelles. Ses articles ont paru dans les revues Canadian Mortgage Professional, Insurance Business Canada et Wealth Professional Canada. Il prête aujourd’hui sa plume à un prêteur alternatif de Toronto, où il occupe le poste de rédacteur publicitaire principal.

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