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Confusion dans l’industrie avec la suppression du test par le BSIF

L’autorité bancaire canadienne a déstabilisé le secteur hypothécaire avec une annonce inattendue. Son représentant a révélé des restrictions méconnues concernant la nouvelle politique. Les courtiers ignoraient largement ces limitations.

OSFI guidance confusion

’Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a annoncé en septembre l’abolition du test de résistance – ou simulation de crise – pour les transferts d’hypothèques non assurées. Cette mesure, effective dès le 21 novembre, vise à faciliter l’accès des emprunteurs aux meilleurs taux du marché.

Cette nouvelle politique élimine désormais le taux minimum admissible, ou TMA, lors d’un transfert de prêt hypothécaire non assuré entre prêteurs, pourvu que le montant et l’amortissement demeurent inchangés.

uLe surintendant adjoint Tolga Yalkin a toutefois dévoilé, juste avant l’entrée en vigueur du changement, une restriction inattendue qui a décontenancé l’industrie.

M. Yalkin a précisé aux parties prenantes que cette modification ne vise que les transferts hypothécaires entre institutions financières fédérales (IFF). « Notre confiance repose sur les pratiques rigoureuses de souscription qu’appliquent ces institutions », a-t-il souligné pendant une période de questions.

Le test de résistance maintient son emprise sur les prêts hypothécaires non assurés qu’ils soient accordés ou transférés aux coopératives de crédit et aux sociétés de financement sous réglementation provinciale. Cette restriction majeure brille pourtant par son absence dans le texte des directives officielles du BSIF.

Les professionnels du secteur expriment leur désarroi face à cette révélation surprise, d’autant plus que la nouvelle restriction semble contredire les directives du BSIF comme une douche froide sur leurs attentes.

Ron Butler, de Butler Mortgages, dénonce cette discrimination : « Pourquoi pénaliser les caisses populaires provinciales ? Le BSIF doute-t-il de leur compétence et de leur fiabilité ? »

Plusieurs professionnels hypothécaires ont confié à Canadian Mortgage Trends, sous le sceau de la confidentialité, qu’ils partageaient l’avis de Butler. Les propos de Tolga Yalkin leur semblaient contredire les déclarations écrites du BSIF. Ils attendent maintenant des précisions.

Cependant, alors que certains prêteurs attendent des précisions, au moins une grande banque, la CIBC, a confirmé qu’elle a déjà mis en œuvre les changements.

Un dirigeant de société de crédit met en doute la validité de cette politique. « S’agit-il vraiment d’une directive officielle du BSIF ou d’une simple remarque improvisée ? » s’interroge-t-il. « Que se serait-il passé si cette question particulière qui a révélé cette restriction n’avait pas été soulevée lors de la séance de questions-réponses ? »

Interrogé sur le sujet, le BSIF a informé Canadian Mortgage Trends que ses documents publiés contiennent toutes les informations sur les récents changements aux exigences de transfert hypothécaire. « Aucune nouvelle directive n’est prévue », a-t-il précisé.

Un changement plutôt symbolique

Le Bureau de la concurrence révèle un paradoxe : les emprunteurs non assurés représentent 75 % du marché, mais à peine 12,5 % d’entre eux osent changer de prêteur au renouvellement. Une timidité qui, selon Ron Butler, risque d’avoir des conséquences majeures alors que déferle la plus importante vague de renouvellements hypothécaires jamais vue au Canada.

« Cette nouvelle touche directement les 12 % d’emprunteurs que nous devions refuser avant, affirme-t-il. Ces clients, autrefois captifs de leur prêteur, peuvent désormais bouger. Le consommateur y gagne, l’emprunteur en profite, et les établissements comme le nôtre peuvent enfin rivaliser pour proposer de meilleures conditions. »

Ron Butler admet toutefois qu’une minorité d’emprunteurs seulement se verrait empêchée de changer de prêt après les déclarations de Tolga Yalkin.

« Les transferts en provenance des coopératives de crédit restent marginaux, poursuit M. Butler. Le test de résistance ne bloque qu’une infime partie de ces transferts. La vraie question touche plutôt à l’équité. L’organisme fédéral met-il en doute la compétence des autorités provinciales ? Une telle attitude serait totalement déplacée. »

Peut-être une simple affaire de juridiction

Les commentaires de Yalkin ont pris de court de nombreux acteurs du secteur, non seulement parce qu’ils semblaient introduire une restriction jusqu’alors non précisée dans le changement de règle, mais aussi parce qu’ils semblaient suggérer un manque de « confiance » dans les pratiques de « souscription hypothécaire rigoureuse » des institutions non réglementées par le BSIF.

Cette remarque improvisée soulève des doutes quant à sa sévérité non intentionnelle et traduit possiblement une simple réalité administrative. Le BSIF, en tant qu’organisme indépendant, se rapporte uniquement au ministre des Finances du Canada. Les règlements provinciaux échappent à son autorité directe, bien que plusieurs institutions non fédérales adoptent volontairement ses normes.

Les acheteurs de prêts hypothécaires titrisés pourraient maintenir l’exigence du test de résistance pour toute titrisation. Cette exigence risque de complexifier davantage le fonctionnement des établissements non régis par le fédéral dans le nouveau cadre réglementaire.

Les sociétés de financement hypothécaire se sont empressées d’adopter ce test de résistance pour maintenir leur capacité de vendre aux institutions sous réglementation fédérale, selon Maria Pimenta, chef des opérations chez Canada Guarantee. « Le problème réside dans la portée limitée des assouplissements, qui ne touchent que les institutions réglementées », précise-t-elle.

Mme Pimenta souligne l’ambiguïté des directives initiales du BSIF. Ces directives ciblent manifestement les institutions financières sous réglementation fédérale, même si leur portée exclusive aux établissements de régime fédéral n’est pas explicitement mentionnée.

Mme Pimenta conseille aux prêteurs non régis par le fédéral de solliciter leurs régulateurs pour adopter des modifications compatibles, plutôt que d’attendre des directives du BSIF.

« Notre test de résistance relève du ministère des Finances et non du BSIF », précise-t-elle. « Le ministère maintient l’obligation de soumettre tout nouveau prêt hypothécaire assuré à une simulation de crise. Cette règle reste inchangée. »

Canada Guarantee, conclut Mme Pimenta, attend toujours une réponse du ministère des Finances après sa demande d’harmonisation avec les nouveaux règlements du BSIF.

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Last modified: novembre 29, 2024

Journaliste indépendant et conférencier torontois, Jared Lindzon possède une plume recherchée par les plus prestigieux médias. Ses articles paraissent dans le Globe & Mail, Fast Company et TIME Magazine, mais aussi dans le New York Times, Rolling Stone, The Guardian et Fortune Magazine.

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