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Le spectre de la récession mine la confiance des Canadiens

L’inquiétude économique grimpe : un tiers des entreprises canadiennes redoute une récession d’ici un an, soit le double du trimestre précédent.

C’est l’un des signaux les plus clairs des derniers sondages de la Banque du Canada, qui montrent un affaiblissement marqué de la confiance des entreprises et des consommateurs.

L’Enquête sur les perspectives des entreprises (EPE) du T1 et l’Enquête sur les attentes des consommateurs canadiens, publiées lundi, dressent un tableau d’incertitude croissante. Le sentiment des entreprises est tombé à son plus bas niveau depuis des années, les consommateurs s’inquiètent davantage de la sécurité d’emploi, et les attentes d’inflation — après une baisse régulière — recommencent à augmenter.

Ces enquêtes précèdent la nouvelle offensive tarifaire américaine.

Les entreprises perdent confiance et redoutent des jours plus sombres

L’indicateur EPE a chuté à -2,14 au premier trimestre, contre -1,16 au trimestre précédent, marquant le premier déclin en trois trimestres et le niveau le plus bas depuis les premiers mois de la pandémie. Une entreprise sur trois s’attend désormais à une récession dans les 12 prochains mois, contre 15 % aux trimestres précédents.

Les tensions commerciales alimentent l’inquiétude. Les entreprises s’inquiétaient déjà avant même les nouveaux tarifs américains sur l’acier, l’aluminium et les produits transfrontaliers, souligne RBC.

La Banque a réalisé son sondage avant l’annonce de ces mesures. La confiance pourrait donc s’être détériorée davantage.

Ce qui inquiète particulièrement, c’est la rapidité avec laquelle les entreprises reculent. Les plans d’investissement, qui rebondissaient fin 2024, sont désormais suspendus ou réduits.

Les intentions d’embauche s’effondrent, atteignant un creux sur neuf ans. Les ventes, notamment pour les exportateurs, peinent à rebondir. L’incertitude quant à la demande des consommateurs et les risques liés aux chaînes d’approvisionnement mondiales pèsent lourdement.

Les coûts s’envolent : deux tiers des entreprises anticipent une hausse des intrants due aux tarifs douaniers et rehausseront leurs prix sous six mois.

Les attentes d’inflation à court terme augmentent, même si les entreprises restent prudentes en matière de salaires. Les attentes d’inflation à long terme restent stables — pour l’instant.

Claire Fan, économiste principale chez RBC, met en garde : le Canada a échappé aux pires mesures douanières américaines, mais leurs conséquences indirectes se font déjà ressentir.

« Les représailles tarifaires du Canada n’ont pas fait flamber l’inflation », a-t-elle souligné. « Notre pays échappe aussi largement aux récentes hausses américaines. Pourtant, le chaos dans les chaînes d’approvisionnement américaines, causé par leurs tarifs draconiens, risque de freiner notre croissance et de gonfler nos prix. »

L’emploi, les finances et les prix préoccupent de plus en plus les consommateurs

L’Enquête sur les attentes des consommateurs canadiens dresse un portrait tout aussi morose du côté des ménages, avec les inquiétudes liées à l’emploi, la hausse des prix et les coûts de logement pesant tous sur le moral.

La crainte de perdre son emploi gagne du terrain chez les Canadiens. Seuls 78 % se sentent encore en sécurité dans leur poste, le niveau le plus bas jamais constaté. De plus, beaucoup doutent désormais de pouvoir retrouver facilement un emploi.

Les Canadiens perdent confiance en leur avenir financier. Plus de 40 % d’entre eux jugent leur situation pire qu’il y a un an. Le pessimisme règne pour les mois à venir. Les ménages repoussent leurs gros achats et réduisent leurs dépenses non essentielles.

Notamment, la part des Canadiens qui déclarent que les loyers élevés ou les paiements hypothécaires ont un impact négatif sur leurs dépenses ménagères a augmenté.

Les coûts du logement inquiètent désormais 20 % des répondants, contre 16 % au trimestre précédent. La hausse des prix pèse sur 45 % des ménages, tandis que l’incertitude économique préoccupe toujours plus de Canadiens.

Les anticipations d’inflation ont aussi changé de direction, l’attente médiane d’inflation à un an bondissant à 3,8 % après avoir décliné régulièrement pendant plus d’un an. C’est le plus haut niveau depuis mi-2023, motivé par les craintes de prix plus élevés pour l’épicerie, l’énergie et les biens importés.

Les attentes salariales demeurent modérées. Les entreprises ne prévoient pas d’augmentations importantes et les consommateurs ne s’y attendent pas non plus. Cela pourrait aider à limiter le risque d’inflation à long terme, mais signifie aussi que les ménages disposent d’une marge plus mince pour absorber la hausse des coûts.

Les implications pour la Banque du Canada

La Banque du Canada jongle entre deux réalités : l’affaiblissement simultané de la confiance des entreprises et des consommateurs.

D’un côté, l’économie perd clairement de son élan — l’investissement des entreprises recule et la confiance des consommateurs s’érode. Dans des circonstances normales, cela constituerait un argument solide pour réduire les taux d’intérêt.

L’inflation prend une tournure préoccupante. Les prix grimpent sous l’effet des tarifs douaniers et des tensions mondiales d’approvisionnement. La Banque se trouve face à un dilemme : une baisse prématurée des taux raviverait l’inflation, tandis qu’une attente prolongée accentuerait le ralentissement économique.

Les marchés parient de plus en plus sur une action à court terme plutôt qu’à long terme. Comme Canadian Mortgage Trends l’a précédemment rapporté, les marchés obligataires estiment désormais à près de 50 % la probabilité d’une baisse des taux lors de la réunion du 16 avril de la Banque. Les faibles chiffres de l’emploi en mars et une série de rapports économiques décevants ont contribué à modifier ces attentes.

Les experts de la Banque Nationale et de RBC prédisent une approche prudente de la Banque du Canada. RBC anticipe une réduction des taux de 25 points lors de la prochaine assemblée.

« Dans un contexte très incertain, note RBC, nous continuons à penser que la Banque du Canada agira avec prudence lors de ses prochaines réunions pour évaluer l’impact sur la croissance et l’inflation, et le fait que la politique fiscale constitue probablement la première ligne de défense la plus appropriée face à la faiblesse économique liée au commerce. ».

Taylor Schleich et Ethan Currie, économistes à la Banque Nationale, doutent qu’une baisse des taux soit imminente la semaine prochaine.

Les conditions financières se dégradent, mais les données économiques ne montrent pas encore de signes de ralentissement suffisants pour justifier une nouvelle mesure — à moins que ce ne soit par nécessité.

L’équipe prévoit un assouplissement si la situation financière continue de se dégrader. Les données seules inciteraient plutôt la BdC à marquer une pause.

« Quel que soit le cours de la semaine prochaine, nous anticipons un assouplissement supplémentaire en 2025. Si les données économiques à venir confirment notre prévision d’un ralentissement, une nouvelle baisse du taux directeur pourrait intervenir dès le 4 juin. »

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Last modified: avril 8, 2025

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